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s’il parut insulter aux malheurs de ses rivaux, s’il les traita d’abord avec orgueil, il exerça par la suite envers eux une clémence qui avait rarement honoré les anciennes victoires de la république. Souvent, dès que la pompe triomphale montait le Capitole, des princes, qui avaient défendu sans succès leur trône ou leur liberté, périssaient en prison par la main d’un bourreau. Les usurpateurs qu’Aurélien menait en triomphe, et que leur défaite avait convaincus du crime de rebellion, passèrent leur vie dans l’opulence et dans un repos honorable. L’empereur fit présent à Zénobie d’une belle maison de campagne, située à Tibur, ou Tivoli, à vingt milles environ de la capitale. Bientôt la reine de Syrie prit les mœurs des dames romaines ; et ses filles épousèrent d’illustres personnages. Sa famille existait encore au milieu du cinquième siècle[1]. Tetricus et son fils, rétablis dans leurs rangs et dans leurs fortunes, élevèrent, sur le mont Célien, un palais magnifique ; et, lorsqu’il fut fini, ils invitèrent leur vainqueur à souper. Aurélien fut agréablement surpris d’y voir, en entrant, un tableau qui représentait la singulière histoire de ses anciens concurrens. Ils étaient peints offrant à l’empereur une couronne civique avec le sceptre de la Gaule, et recevant de ses mains la

  1. Vopiscus, Hist. Aug., p. 199 ; saint Jérôme, in Chron. ; Prosper, in Chron. Baronius suppose que Zenobius, évêque de Florence, du temps de saint Ambroise, était de sa famille.