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en ordre de bataille, se tenaient sous les armes dans un silence imposant. Les principaux commandans, revêtus des marques de leur dignité, entouraient à cheval le trône de l’empereur. Derrière le trône, les images sacrées du prince et de ses prédécesseurs[1], les aigles dorées, et les tableaux sur lesquels étaient écrits en lettres d’or les noms et les titres honorables des légions, brillaient dans l’air, élevés sur de hautes piques couvertes d’argent. Lorsque l’empereur prit séance, son maintien noble, sa beauté mâle et sa figure majestueuse[2], apprirent aux Barbares à révérer la personne aussi-bien que la pourpre de leur vainqueur. Les députés se prosternèrent contre terre en silence ; ils eurent ordre de se relever, et on leur accorda la liberté de parler, ce qu’ils firent avec le secours des interprètes. Ils cherchèrent à diminuer leur perfidie, exagérèrent leurs exploits, s’étendirent sur les vicissitudes de la fortune, vantèrent les avantages de la paix, et, avec une confiance mal placée, ils demandèrent un subside considérable pour prix de l’alliance qu’ils offraient aux Romains. La réponse d’Aurélien fut sévère et impérieuse. Il traita leurs offres avec mépris, et leurs demandes avec indignation. Après leur avoir reproché d’ignorer également l’art de la guerre et les

  1. L’empereur Claude était certainement du nombre ; mais nous ignorons jusqu’où s’étendait cette marque de respect. Si elle remontait à César et à l’empereur Auguste, elle devait former un spectacle bien imposant, une longue suite des maîtres du monde.
  2. Vopiscus, Hist. Aug., p. 210.