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dit Saturnin à ses troupes le jour de son élévation, vous avez perdu un commandant utile, et vous avez fait un bien malheureux empereur[1]. »

Leur mort violente.

Les révolutions sans nombre dont il avait été témoin, justifiaient ses appréhensions. Des dix-neuf tyrans qui prirent les armes sous le règne de Gallien, il n’y en a aucun dont la vie ait été tranquille, ou la mort naturelle. Dès qu’ils avaient été revêtus de la pourpre ensanglantée, ils inspiraient à leurs partisans les mêmes craintes ou la même ambition qui avait occasionné leur révolte. Environnés de conspirations domestiques, de séditions militaires et de guerres civiles, ils tremblaient sur le bord de l’abîme dans lequel, après les anxiétés les plus cruelles, ils se voyaient tôt ou tard précipités. Ces monarques précaires recevaient cependant les honneurs dont pouvait disposer la flatterie des armées et des provinces qui leur obéissaient ; mais leurs droits, fondés sur la rebellion, n’ont jamais pu obtenir la sanction de la loi, ni être consignés dans l’histoire. L’Italie, Rome et le sénat embrassèrent constamment la cause de Gallien, qui seul fut regardé comme le souverain de l’empire. À la vérité, ce prince ne dédaigna point de reconnaître les armes victorieuses d’Odenat, qui méritait cette honorable distinction par sa conduite respectueuse envers le fils de Valérien. Le sénat, avec l’approbation générale des Romains, et du consentement de l’empereur, con-

  1. Hist. Aug., p. 196.