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Crimée, péninsule connue chez les anciens sous le nom de Chersonèse Taurique[1]. C’est sur ce rivage affreux qu’Euripide a placé la scène d’une de ses plus intéressantes tragédies[2]. L’imagination de ce poète savait embellir des plus brillantes couleurs les traditions de l’antiquité. Les sacrifices sanglans offerts à Diane, l’arrivée d’Oreste et de Pylade, le triomphe de la religion et de la vertu sur la férocité sauvage, sont l’emblème d’une vérité historique. Les Tauri, premiers habitans de la péninsule, avaient des mœurs cruelles ; elles s’adoucirent insensiblement par leur commerce avec les Grecs qui s’établirent le long des côtes maritimes. Ces colons dégénérés et des Barbares à peine civilisés, formèrent le petit royaume du Bosphore dont la capitale avait été bâtie sur le détroit par où les eaux des Palus-Méotides tombent dans le Pont-Euxin. À compter de la guerre du Péloponnèse, le Bosphore fut un état indépendant[3] ; ensuite il fut subjugué par l’ambitieux Mithridate[4] ; il céda plus tard, comme le reste des états de ce prince, à la force des armes romaines. Après la chute de la république[5], les rois du

  1. M. de Peyssonnel, qui avait été consul français à Caffa, dans ses Observations sur les peuples barbares qui ont habité les bords du Danube.
  2. Euripide, dans sa tragédie d’Iphigénie en Tauride.
  3. Strabon, l. VII, p. 309. Les premiers rois du Bosphore furent alliés d’Athènes.
  4. Appien, in Mithrid.
  5. Ce royaume fut réduit par les armes d’Agrippa. Orose,