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retraite des Goths. Encouragés par le retour de la fortune, il se préparait à frapper de plus grands coups, et il attendait avec inquiétude le moment de venger sa propre gloire et celle des armes romaines[1].

Dèce rétablit l’office de censeur dans la personne de Valérien.

Dans le temps qu’il luttait contre la violence de la tempête, son esprit calme et réfléchi, au milieu du tumulte de la guerre, méditait sur les causes plus générales qui, depuis le siècle des Antonins, avaient précipité si impétueusement la décadence de la grandeur romaine. Il découvrit bientôt qu’il était impossible de replacer cette grandeur sur une base solide, sans rétablir la vertu publique, les principes fondamentaux de la constitution, les mœurs antiques de l’état, et la majesté opprimée des lois. Pour exécuter un projet si beau, mais si difficile, il résolut de faire revivre l’ancien office de censeur, magistrature importante qui avait beaucoup contribué à maintenir le gouvernement[2], jusqu’à ce qu’usurpée par les Césars, elle eût perdu son intégrité primitive, et fût tombée insensiblement en oubli[3]. Persuadé que la

  1. Jornandès, c. 16-18 ; Zosime, l. I, p. 22. Il est aisé de découvrir, dans le récit général de cette guerre, les préjugés opposés de l’auteur grec et de l’historien des Goths. Ils ne se ressemblent que par le manque d’exactitude.
  2. Montesquieu, Grandeur et décadence des Romains, c. 8. Il parle de la nature et de l’usage de la censure avec sa sagacité ordinaire et avec une précision peu commune.
  3. Vespasien et Titus furent les derniers censeurs. (Pline, Hist. nat., VII, 49 ; Censorin, De die natali). La modestie