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tance trop vaste pour être franchie les mettait à l’abri de tout danger de la part des Barbares. L’irruption des Goths, sous le règne de Philippe, les tira de leur funeste erreur. Le roi ou chef de cette fière nation, traversa avec mépris la province de la Dacie, et passa le Niester et le Danube, sans rencontrer aucun obstacle. Les troupes romaines ne connaissaient déjà plus de discipline ; elles livrèrent à l’ennemi les postes importans qui leur avaient été confiés, et la crainte d’un juste châtiment en fit passer un grand nombre sous les étendards des Goths. Tous ces Barbares parurent enfin devant Marcianopolis[1], ville bâtie par Trajan en l’honneur de sa sœur, et qui servait alors de capitale à la seconde Mœsie[2]. Les habitans se crurent trop heureux de racheter à prix d’argent leurs biens et leurs personnes ; et les conquérans retournèrent dans leurs déserts, plutôt encouragés que satisfaits par ce premier succès de leurs armes contre un état faible, mais opulent. Dèce fut bientôt informé que Cniva, roi des Goths, avait passé une seconde fois le Danube avec des

  1. Aujourd’hui Prebislaw, chez les Bulgares. D’Anville, Géogr. anc., t. I, p. 311. (Note de l’Éditeur.)
  2. Dans le seizième chapitre de Jornandès, au lieu de secundo Mœsiam, on peut substituer secundam, la seconde Mœsie, dont Marcianopolis était certainement la capitale. (Voyez Hiéroclès, De Provinciis, et Wesseling, ad locum, p. 636, Itineraria.) Il est étonnant qu’une faute si palpable du copiste ait échappé à la correction judicieuse de Grotius.