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inutiles, et maintenait son autorité en donnant l’exemple. Sous sa conduite, les Albanais se crurent invincibles et le parurent à leurs ennemis. Attirés par l’éclat de sa renommée, les plus braves aventuriers de France et d’Allemagne accoururent et furent accueillis sous ses drapeaux. Ses troupes permanentes consistaient en huit mille chevaux et sept mille hommes d’infanterie. Ses chevaux étaient petits et ses guerriers actifs ; [Sa valeur.]mais Scanderbeg jugeait habilement des obstacles et des ressources qu’offraient ses montagnes ; des torches allumées annonçaient le danger, et toute la nation se distribuait dans des postes inaccessibles. Avec ces forces inégales, Scanderbeg résista durant vingt-trois années à toute la puissance de l’empire ottoman, et deux conquérans, Amurath II et son fils plus grand que lui, échouèrent toujours contre un rebelle qu’ils poursuivaient avec un mépris simulé et un ressentiment implacable. Amurath entra dans l’Albanie suivi de soixante mille chevaux et de quarante mille janissaires. Il put sans doute ravager les campagnes, occuper les villes ouvertes, convertir les églises en mosquées, circoncire les jeunes chrétiens et immoler les captifs inviolablement attachés à leur religion ; mais ses conquêtes se bornèrent à la petite forteresse de Sfetigrade, dont la garnison, qui résista constamment aux assauts, fut vaincue par un artifice grossier et par les scrupules de la superstition[1]. Amurath perdit beau-

  1. Il y avait deux Dibras, le supérieur et l’inférieur ;