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vince se révoltait contre Rome, la statue qui la représentait se tournait vers le point de l’horizon où étaient les rebelles, la clochette sonnait, le prophète du Capitole annonçait le prodige, et le sénat était averti du danger qui menaçait la république. » On trouve dans le même ouvrage un second exemple moins important d’une égale absurdité ; il est relatif aux deux chevaux de marbre conduits par de jeunes hommes qui, des bains de Constantin, ont été transportés au mont Quirinal. L’auteur les attribue à Phidias et à Praxitèle ; et son assertion, dénuée de fondement, serait excusable s’il ne se trompait pas de plus de quatre siècles sur le temps où vécurent ces statuaires grecs, s’il ne les plaçait pas sous le règne de Tibère, s’il n’en faisait pas des philosophes ou des magiciens qui adoptèrent la nudité pour emblème de leurs connaissances et de leur amour du vrai, qui révélèrent à l’empereur ses actions les plus secrètes, et qui, après avoir refusé des récompenses pécuniaires, sollicitèrent l’honneur de laisser à la postérité ce monument d’eux-mêmes[1]. L’esprit des Romains en proie aux idées de magie, devint insensible aux beautés de l’art ; le Pogge ne trouva plus à Rome que cinq statues, et par bonheur, tant d’autres ensevelies sous les ruines par hasard ou de dessein prémédité, n’ont été

  1. Anonyme (p. 289). Montfaucon (p. 191) observe avec raison que si Alexandre est représenté dans ces statues, elles ne peuvent être l’ouvrage de Phidias (Olympiade 83) ni de Praxitèle (Olympiade 104), qui vécurent avant ce prince. (Pline, Hist. nat., XXXIV, 19)