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ciel, implora la protection du Dieu de vérité, et demanda au prophète Jésus-Christ de venger cette dérision impie de son nom et de sa religion[1]. Avec un corps inférieur en nombre et des rangs en désordre, Ladislas se précipita courageusement sur les ennemis, et perça jusqu’à la phalange impénétrable des janissaires. [Mort de Ladislas]Amurath, si l’on en croit les annales ottomanes, perça d’un javelot le cheval du roi de Hongrie[2] ; Ladislas tomba sur les lances de l’infanterie ; et un soldat turc s’écria d’une voix forte : « Hongrois, voilà la tête de votre roi ! » La mort de Ladislas fut le signal de leur défaite ; et Huniades, accourant de son imprudente poursuite, déplora son erreur et le malheur public. Après avoir tâché inutilement de retirer le corps du roi, accablé par la multitude confuse des vainqueurs et des vaincus, il employa les derniers efforts de son courage et de son habileté à sauver les restes de sa cavalerie valaque. Dix mille chrétiens périrent à la désastreuse ba-

  1. Quelques auteurs chrétiens affirment qu’il tira de son sein une autre hostie que celle sur laquelle on avait juré d’observer le traité. Les Musulmans supposent avec plus de simplicité un appel de leur souverain au prophète Jésus-Christ ; et cette opinion semble être celle de Callimaque (l. III, p. 516 ; Spondan., A. D. 1444, no 8).
  2. Un critique judicieux croira difficilement à ces spolia opima d’un général victorieux, si rarement obtenues par la valeur, et si souvent inventées par l’adulation (Cantemir, p. 90, 91). Callimaque (l. III, p. 517) dit plus simplement et avec plus de vraisemblance : Supervenientibus janizaris, telorum multitudine, non tam confossus est, quam obrutus.