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continuellement en rond avec des fanatiques qui prenaient l’étourdissement de la tête pour la lumière de l’esprit[1]. Mais l’invasion des Hongrois réveilla bientôt de ce rêve d’enthousiasme ; et son fils prévint le vœu du peuple en s’adressant à son père au moment du danger. Sous la conduite de leur ancien général, les janissaires furent vainqueurs ; mais il revint du champ de bataille de Warna prier, jeûner et tourner avec ses compagnons de retraite de Magnésie. Le danger de l’état interrompit une seconde fois ses pieuses occupations. L’armée victorieuse dédaigna l’inexpérience de son fils : Andrinople fut abandonnée au meurtre et au pillage, et l’émeute des janissaires décida le divan à solliciter la présence d’Amurath pour prévenir leur révolte. Ils reconnurent la voix de leur maître, tremblèrent et obéirent ; et le sultan fut forcé à supporter malgré lui sa brillante servitude, dont au bout de quatre ans il fut délivré par l’ange de la mort. L’âge ou les infirmités, le caprice ou l’infortune ont fait descendre plusieurs princes du trône, et ils ont eu le temps de se repentir de cette démarche irrévocable. Mais le seul Amurath, libre de choisir, et après avoir essayé de

  1. Rycault (dans l’État présent de l’empire ottoman, p. 242-268) donne beaucoup de détails qu’il tira de ses conversations personnelles avec les principaux derviches, qui font pour la plupart, remonter leur origine au règne d’Orchan. Il ne parle point des Zichides de Chalcocondyles (l. VII, p. 286), parmi lesquels se retira Amurath. Les Seids de cet auteur sont les descendans de Mahomet.