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liance des monarques, voulait leur fonder de nouveaux royaumes dans la Lombardie et la Toscane, et les revêtir à jamais de l’office de sénateurs de Rome. Tout ce que nous avons dit de la grandeur des Colonne, rejaillit également sur les Ursins, qui ont toujours été leurs antagonistes et toujours leurs égaux en forces durant la longue querelle qui troubla l’état de l’Église pendant plus de deux siècles et demi. [Leurs querelles héréditaires.]La jalousie de la prééminence et du pouvoir fut la véritable cause de cette querelle ; mais pour donner à leurs divisions un prétexte spécieux, les Colonne adoptèrent le nom de Gibelins et le parti de l’empire, et les Ursins épousèrent celui de Guelfes et la cause de l’Église. L’aigle et les fiefs paraissaient sur leurs bannières ; et ces factions qui se partagèrent l’Italie ne se livrèrent jamais à de plus violentes fureurs qu’à l’époque où l’on avait oublié dès long-temps l’origine et la nature de la dispute[1]. Après la retraite des papes à Avignon, elles se disputèrent, les armes à la main, le gouvernement de la république ; elles réglèrent à la fin qu’on élirait chaque année deux sénateurs rivaux, ce qui perpétua les maux de la discorde. Leurs hostilités particulières désolèrent la ville et la campagne, et la balance pencha alternativement de l’un et de l’autre côté. Mais aucun individu des deux familles n’avait péri par le glaive à l’époque où Étienne Colonne le jeune surprit et égorgea le cham-

  1. Muratori, dans sa cinquante-unième dissertation sur les antiquités d’Italie, explique l’origine des factions des guelfes et des gibelins.