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la nation et même dans la province au milieu de laquelle ils résidaient, et attachés à leur patrie par des liens indissolubles,

Institution du jubilé ou de l’année sainte. A. D. 1300.

Le progrès de l’industrie avait formé et enrichi les républiques de l’Italie ; le temps de leur liberté est l’époque la plus florissante de leur population et de leur agriculture, de leurs manufactures et de leur commerce ; leurs travaux, d’abord mécaniques, amenèrent peu à peu les arts du luxe et du génie. Mais la position de Rome était moins favorable, et le sol moins fertile ; ses habitans avilis par la paresse et enivrés par l’orgueil, s’imaginaient follement que le tribut des sujets devait nourrir à jamais la métropole de l’Église et de l’empire. Le grand nombre de pèlerins qui venaient au tombeau des apôtres, entretenait à quelques égards ce préjugé ; et le dernier legs des papes, l’institution de l’Année sainte[1], ne fut pas moins utile au peuple qu’au clergé. Depuis la perte de la Palestine, le bienfait des indulgences plenières, destiné aux croisades, demeurait sans objet, et le trésor le plus précieux de l’Église avait été enlevé huit ans à la circulation publique. Boniface VIII, à la fois ambitieux et avare, lui ouvrit un nouveau canal ; il se trouva assez instruit pour connaître et rappeler les jeux séculaires qu’on célébrait à Rome à la fin de

  1. Les premiers détails que nous ayons sur cette affaire sont du cardinal Jacques Caiétan (Maxima Bibl. patrum, t. 25) ; je suis embarrassé de déterminer si le neveu de Boniface VIII était un sot ou un fripon ; mais on a moins d’incertitude sur le caractère de son oncle.