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l’enthousiasme de liberté qu’inspirent les auteurs classiques, il fit sentir aux Romains combien, par leur patience et les vices du cierge, ils avaient dégénéré des premiers temps de l’Église et de la cité. Il les engagea à revendiquer leurs droits inaliénables d’hommes et de chrétiens, à rétablir les lois et les magistrats de la république, à respecter le nom de l’empereur, mais à réduire leur pasteur au gouvernement spirituel de son troupeau[1]. Le gouvernement spirituel du pape ne put même échapper à la censure du réformateur, et il apprit au clergé inférieur à résister aux cardinaux qui avaient usurpé une autorité despotique sur les vingt-huit quartiers ou paroisses de Rome[2]. Cette révolution ne put s’accomplir sans violence et sans pillage, sans que le sang coulât et que plusieurs maisons fussent démolies. La faction victorieuse s’enrichit des dépouilles du clergé et des nobles du parti contraire. Arnaud de

  1. Il conseillait aux Romains,

    Consiliis armisque suis moderamina sumnia
    Arbitrio tractare suo : nil juris in hâc re
    Pontifici summo, modicum concedere regi
    Suadebat populo. Sic læsâ stultus utrâque
    Majestate, reum geminæ se fecerat aulæ.

    Et la poésie de Gunther s’accorde en ce point avec la prose d’Othon.

  2. Voyez Baronius (A. D. 1148, nos 38, 39), d’après le manuscrit du Vatican : il s’élève à grands cris contre Arnaud (A. D. 1141, no 3). C’est à lui qu’il attribue les hérésies politiques qu’on voyait alors en France, et dont l’influence le blessait.