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ronne augmenta le nombre et enflamma les passions de leurs ennemis. Les Romains, sujets et adversaires à la fois de l’évêque et de l’empereur, ne purent jamais embrasser de bonne foi et avec persévérance les haines mortelles des Guelfes ou de Gibelins, si fatales à l’Italie ; mais ils étaient recherchés par les deux partis, et dans leurs bannières ils arboraient alternativement les clefs de saint Pierre et l’aigle d’Allemagne. Grégoire VII, qu’on peut ou honorer ou détester comme le fondateur de la souveraineté des papes, fut chassé de Rome, et mourut en exil à Salerne. Trente-six de ses successeurs[1] soutinrent jusqu’à leur retraite à Avignon, une lutte inégale contre les Romains : on oublia souvent le respect dû à leur âge et à leur dignité, et les églises, au milieu des solennités de la religion, furent souvent souillées de meurtres et de séditions[2]. Ces désordres sans liaison et sans but, effets d’une brutalité

  1. On trouve dans les Historiens italiens de Muratori (t. III, part. I, p. 277-685) la vie des papes depuis Léon IX et Grégoire VII, par le cardinal d’Aragon, Pandolphe de Pise, Bernard Guide, etc., écrivains contemporains qui ont écrit d’après des monumens authentiques, et j’ai toujours eu ce recueil sous les yeux.
  2. Les dates qu’on trouve à la marge de ce chapitre peuvent être envisagées comme des renvois aux Annales de Muratori, cet excellent guide que je suis ordinairement. Il emploie et cite avec la liberté d’un maître sa grande Collection des Historiens italiens, en vingt-huit volumes, et ce trésor étant dans ma bibliothéque, c’est par plaisir et non par nécessité que j’ai consulté les originaux.