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tèrent son exemple ; ils en jurèrent Dieu, la Vierge Marie, les dames et le faisan : ils y ajoutèrent des vœux particuliers non moins extravagans que la teneur générale de leur serment. Mais l’exécution de tous ces engagemens dépendait de quelques événemens à venir et étrangers à cette entreprise ; et le duc de Bourgogne, qui vécut encore douze ans, put, jusqu’au dernier moment de sa vie, paraître et se croire peut-être à la veille de son départ. Si le même feu avait embrasé tous les cœurs, si l’union des chrétiens avait égalé leur valeur, si toutes les puissances, depuis la Suède[1] jusqu’à Naples, avaient fourni dans une juste proportion, leur contingent de cavalerie, d’infanterie et de subsides, il y a lieu de croire que les Européens auraient repris Constantinople, et qu’on aurait repoussé les Turcs au-delà de l’Hellespont et de l’Euphrate. Mais le secrétaire de l’empereur, qui écrivit toutes les dépêches, qui assista à toutes les assemblées, Æneas Sylvius[2], homme distingué par ses vues politiques et ses talens ora-

  1. D’après un dénombrement qui se fit alors, on trouva que la Suède, la Gothie et la Finlande, contenaient dix-huit cent mille combattans, et qu’ainsi elles étaient bien plus peuplées que de nos jours.
  2. Spondanus a fait, en 1454, d’après Æneas Sylvius, le tableau de l’état de l’Europe, qu’il a enrichi de ses observations. Ce précieux annaliste et l’Italien Muratori donnent la suite des événemens depuis 1453 jusqu’en 1481, époque de la mort de Mahomet, et à laquelle je terminerai ce chapitre.