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jusqu’aux sept tours, la terre et la mer furent éclairés des feux qu’ils allumèrent pendant la nuit. La situation des chrétiens était bien différente.

Dernier adieu de l’empereur et des Grecs.

ils déploraient avec des cris impuissans leurs péchés ou le châtiment qui les menaçait. On avait exposé dans une procession solennelle l’image céleste de la Vierge ; mais la Vierge n’écouta point leurs prières ; ils accusaient l’obstination de l’empereur, qui n’avait pas voulu rendre la place quand il en était encore temps : ils anticipaient les horreurs de leur sort, et soupiraient après le repos et la sûreté dont ils espéraient jouir dans l’esclavage des Turcs. Les plus nobles d’entre les Grecs et les plus braves d’entre les alliés furent mandés au palais le 28 au soir, pour s’y préparer à l’assaut général qu’ils allaient avoir à soutenir. Le dernier discours de Paléologue fut l’oraison funèbre de l’Empire romain[1]. Il promit, conjura, et essaya vainement de ranimer dans les cœurs l’espoir éteint dans le sien ; il n’avait à offrir pour le présent qu’un aspect triste et sombre, et l’Évangile ni l’Église chrétienne n’ont promis aucune récompense sensible aux héros qui tomberaient en servant leur pays. Mais l’exemple du prince, et l’ennui de se voir renfermer dans une ville assiégée, avaient armé ces guerriers du courage du désespoir. L’histo-

  1. Je crains que Phranza n’ait composé ce discours, et il a une odeur si forte de sermon et de couvent, que je doute beaucoup que Constantin l’ait prononcé. Léonard lui attribue une autre harangue, dans laquelle il montre plus d’égards pour les Latins qui lui servaient d’auxiliaires.