Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 13.djvu/104

Cette page a été validée par deux contributeurs.

oda. On exhorta les musulmans à purifier, pour ce pieux combat, leur esprit par la prière, leur corps par sept ablutions, et à s’abstenir de nourriture jusqu’au soir du lendemain. Une foule de derviches parcourut les tentes, pour inspirer aux soldats le désir du martyre, pour leur donner l’assurance qu’ils passeraient une jeunesse inépuisable au milieu des rivières et des jardins du paradis, et dans les bras des houris aux yeux noirs. Mahomet toutefois comptait principalement sur l’effet des récompenses temporelles et visibles. On promit une double solde comme prix de la victoire. « La ville et les bâtimens m’appartiennent, dit Mahomet, mais je vous abandonne les captifs et le butin, les trésors de l’or et de la beauté ; soyez riches et heureux. Les provinces de mon empire sont nombreuses, l’intrépide soldat qui montera le premier sur les murs de Constantinople, sera récompensé par le gouvernement de la plus belle et de la plus riche, et ma reconnaissance accumulera sur lui des honneurs et une fortune au-delà de ses espérances. » Des motifs si variés et si puissans répandirent une ardeur générale parmi les Turcs ; méprisant la mort, et impatiens du combat, ils firent retentir le camp de l’acclamation mahométane : « Dieu est Dieu : il n’y a qu’un Dieu, et Mahomet est l’apôtre de Dieu[1] ; » et depuis Galata

  1. Phranza s’indigne contre ces acclamations des musulmans, non pour l’emploi du nom de Dieu, mais parce qu’ils y mêlent celui du prophète. Le zèle pieux de Voltaire est excessif et même ridicule.