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ne fussent point en si grand nombre, il n’est pas moins vrai que les Français croyaient à cette multitude, et que cette opinion est une preuve évidente de leur intrépidité.

Premier siége et conquête de Constantinople par les Latins. Juillet 7-18.

Dans le choix de l’attaque, les Français et les Vénitiens différèrent d’opinion ; chacun d’eux préférait le genre de combat dans lequel il avait plus d’expérience ; les derniers soutenaient, avec raison, que Constantinople était plus accessible du côté de la mer et du port ; mais les premiers purent déclarer sans honte qu’ils avaient suffisamment hasardé leur vie et leur fortune dans une barque et sur un élément perfide, et demandèrent à haute voix des épreuves dignes de la chevalerie, un terrain solide et un combat corps à corps, soit à pied, soit à cheval. On s’accorda prudemment à employer les deux nations au service qui leur convenait le mieux. L’armée pénétra, sous la protection de la flotte, jusqu’au fond du port ; on répara diligemment le pont de pierre placé sur le fleuve ; et les six divisions des Français formèrent leur camp en face de la capitale, sur la base du triangle qui s’étend à quatre milles depuis le port jusqu’à la Propontide[1]. Placés au bord d’un fossé large et profond, et au pied d’un rempart élevé,

  1. D’après les plans les plus corrects de Constantinople, je ne puis admettre qu’une étendue de quatre mille pas. Cependant Villehardouin fixe l’espace à trois lieues (no 86). Si ses yeux ne l’ont pas trompé, il faut croire qu’il comptait par lieues gauloises, qui n’étaient que de quinze cents pas, et dont peut-être on se sert encore en Champagne.