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Grèce, ses offres et ses menaces. Nous devons notre amitié, il doit obéissance à l’héritier légitime, au jeune prince qui siége ici parmi nous, et à son père, l’empereur Isaac, privé de son trône, de sa liberté et de la vue par un frère ingrat ; qu’il confesse son crime, qu’il implore la clémence de celui qu’il a persécuté, et nous intercéderons pour qu’il lui soit permis de vivre dans la paix et dans l’abondance. Mais nous regarderons une seconde ambassade comme une insulte, et nous n’y répondrons que le fer à la main dans le palais de Constantinople[1]. »

Passage du Bosphore. 6 juillet.

Dix jours après leur arrivée à Scutari, les croisés se préparèrent, comme soldats et comme catholiques, au passage du Bosphore. L’entreprise était dangereuse ; le canal était large et rapide ; dans un calme, le courant de l’Euxin pouvait descendre au milieu de la flotte les feux formidables connus sous le nom de feux grégeois ; et soixante-dix mille hommes, rangés en bataille, défendaient la rive opposée. Dans cette journée mémorable, où le hasard voulut que le temps fût doux et le ciel serein, les Latins distribuèrent leur ordre de bataille en six divisions. La première, ou avant-garde, était conduite par le comte de Flandre, un des plus puissans parmi les princes chrétiens par le nombre et l’habileté de ses arbalétriers ; les quatre qui suivaient étaient commandées

  1. Καθαπερ ιερων αλσεων, ειπειν δε και θεοφυτεντων παραδειοων εφειδοντο το‌υτωνι. Nicétas, in Alex. Comneno, l. III, c. 9, p. 348.