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monarque produisit une fausse et lâche unanimité. Deux fidèles patriotes osèrent seuls déclarer leurs sentimens personnels et ceux de la nation. Démetrius, frère de l’empereur, se retira à Venise pour n’être pas témoin de cette union ; et Marc d’Éphèse, prenant peut-être son orgueil pour sa conscience, traita les Latins d’hérétiques, rejeta leur communion, et se déclara hautement le champion de l’Église grecque et orthodoxe[1]. On essaya de rédiger le traité d’union en termes qui pussent satisfaire les Latins sans trop humilier les Grecs ; mais en pesant les mots et les syllabes, on laissa cependant un peu incliner la balance en faveur du Vatican. On convint (je demande ici l’attention du lecteur) que le Saint-Esprit procède du père et du fils comme d’un même principe et d’une même substance ; qu’il procède par le fils étant de la même nature et de la même substance, et qu’il procède du père et du fils par une spiration et une production. On comprendra plus facilement les articles du traité préliminaire. Eugène s’engageait vis-à-vis des Grecs à payer tous les frais de leur retour ; à entretenir dans tous les temps deux galères et trois cents soldats pour la défense de Constantinople ; à fournir dix galères pour un an,

  1. J’oubliais un autre opposant d’un rang moins élevé, mais très-orthodoxe, le chien favori de Paléologue, qui ordinairement tranquille sur le marchepied du trône, aboya avec fureur durant la lecture du traité d’union. On employa inutilement les caresses et les coups de fouet pour le faire taire (Syropulus, p. 265, 266).