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la terre, furent rangés autour du banquet royal ; les ambassadeurs de l’Europe n’en furent point exclus, dit l’orgueilleux historien persan. C’est ainsi, ajoute-t-il, que les casses, les plus petits des poissons, trouvent leur place dans l’Océan[1]. Le peuple témoigna sa joie par des mascarades et des illuminations. Tous les ouvriers de Samarcande passèrent en revue, et chaque corps de métier tâcha de se distinguer par quelque invention ingénieuse, quoique spectacle singulier tiré des moyens de sa profession. Lorsque les cadis eurent ratifié les contrats de mariage, les princes se retirèrent avec leurs épouses dans les chambres nuptiales, où, selon l’usage des Asiatiques, ils changèrent neuf fois de vêtemens. À chaque nouvelle parure, les perles et les pierreries dont ils couvraient leur tête étaient dédaigneusement abandonnées aux gens de leur suite. On proclama un édit d’indulgence générale ; les lois suspendirent leur activité ; tous les plaisirs furent permis ; le peuple se trouva libre et le souverain demeura oisif ; et l’historien de Timour peut observer qu’après avoir dévoué cinquante ans

  1. Sherefeddin (l. VI, c. 24) cite les ambassadeurs d’un des plus puissans souverains de l’Europe : nous savons qu’il est question de Henri III, roi de Castille. La relation curieuse de ses deux ambassades existe encore (Mariana, Hist. Hispan., l. XIX, c. 11, p. 329-330 ; Avertissement à l’Histoire de Timour-Bec, p. 28-33). Il paraît aussi qu’il y eut quelque correspondance entre l’empereur mongoul et la cour de Charles VII, roi de France (Hist. de France par Velli et Villaret, t. XII, p. 336).