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lui-même trop précipitamment du champ de bataille. Les forces de l’Anatolie, fidèles dans leur révolte, retournèrent sous les étendards de leurs princes légitimes. Ses alliés tartares s’étaient laissé séduire par les lettres et les émissaires de Timour[1], qui leur reprochait la honte de servir sous les esclaves de leurs ancêtres, et leur offrait l’espérance ou de délivrer leur ancienne patrie, ou même de régner dans la nouvelle. À l’aile droite de Bajazet, les cuirassiers d’Europe chargèrent loyalement et avec une valeur irrésistible : mais la fuite simulée et précipitée des Tartares mit en désordre ces hommes chargés de fer ; et leur imprudente poursuite exposa les janissaires, seuls, sans cavalerie et sans armes de trait, à un cercle de chasseurs mongouls. Leur courage fut enfin accablé par la soif, la chaleur et la multitude de leurs ennemis ; et l’infortuné Bajazet, qu’un accès de goutte rendait impotent des mains et des jambes, fut transporté hors du champ de bataille par un de ses plus rapides coursiers : le kan titulaire de Zagatai courut à sa poursuite et l’atteignit. [Défaite et captivité de Bajazet.]Après la défaite des Turcs et la prise de sultanat, toute l’Anatolie se soumit au vainqueur, qui planta ses étendards à Kiotahia, et répandit de tous côtés ses ministres de rapine et de destruction. Mirza Mehemmed, sultan, l’aîné et le

  1. Timour a dissimulé cette importante négociation avec les Tartares ; mais elle est évidemment constatée par le témoignage des Annales arabes (t. I, c. 47, p. 391), des Annales turques (Leunclav., p. 321) et des historiens persans (Khondemir, ap. d’Herbelot, p. 882).