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mes ennemis sont eux-mêmes les auteurs de leurs calamités. » Pendant cette paisible conversation, le sang ruisselait dans les rues d’Alep, et l’on entendait de toutes parts les cris des mères et des enfans et ceux des vierges que l’on violait. Le riche pillage abandonné aux soldats put animer leur avidité ; mais leur cruauté fut justifiée par l’ordre absolu qui leur fut donné de présenter un certain nombre de têtes que, selon son ordinaire, il fit arranger avec soin en colonnes et en pyramides. Les Mongouls passèrent la nuit à célébrer leur victoire par des réjouissances, et ce qui restait de musulmans la passa dans les chaînes et dans les larmes. Je ne suivrai point la marche du dévastateur d’Alep à Damas, où les armées d’Égypte l’attaquèrent avec vigueur et le défirent presque entièrement. On attribua un mouvement qu’il fit en arrière à sa détresse et à son désespoir : un de ses neveux passa à l’ennemi ; mais lorsque les Syriens se réjouissaient de sa défaite, la révolte des Mamelucks obligea le sultan de se réfugier précipitamment et honteusement dans son palais du Caire. Quoique abandonnés de leur prince, les habitans de Damas défendirent leurs murs ; et Timour offrit de lever le siége, s’ils voulaient se racheter par des présens, dont chaque article serait composé de neuf pièces. Mais dès qu’on l’eut introduit dans la ville sous la foi d’une trêve, violant le traité avec perfidie, il exigea une contribution de dix millions en or, et excita ses troupes à châtier la postérité des Syriens, qui avaient exécuté ou approuvé le meurtre du petit-fils de Mahomet.