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obéirent docilement au prédicateur. [Les barons français se croisent.]Le jeune Thibaut, comte de Champagne, âgé de vingt-deux ans, s’élança le premier dans cette sainte carrière, animé par l’exemple de son père et de son frère aîné, dont le premier avait marché à la tête de la seconde croisade, et l’autre était mort en Palestine avec le titre de roi de Jérusalem. Deux mille deux cents chevaliers lui devaient l’hommage[1] et le service militaire ; la noblesse de Champagne excellait dans l’exercice des armes[2], et par son mariage avec l’héritière de Navarre, Thibaut pouvait ajouter à ses troupes une bande courageuse de Gascons tirés des deux côtés des Pyrénées. Il eut pour compagnon d’armes, Louis, comte de Blois et de Chartres, qui tirait comme lui son origine du sang royal ; ces deux princes étaient l’un et l’autre neveux en même temps du roi de France et de celui d’Angleterre. Dans la foule des barons et des prélats qui imitèrent leur zèle, je distingue la naissance et le mérite de Matthieu de Montmorenci, le fameux Simon de Montfort, le fléau des Albigeois, et le vaillant Geoffroi de Ville-

  1. Ce nombre de fiefs, dont dix-huit cents devaient hommage-lige, était enregistré dans l’église de Saint-Étienne de Troyes, et fut attesté en 1213 par le maréchal de la Champagne (Ducange, Observ., p. 254).
  2. Campania… militiæ privilegio singularis excellit… in tyrociniis… prolusione armorum, etc. (Ducange, p. 249), tiré de l’ancienne Chronique de Jérusalem, A. D. 1177-1199.