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jusqu’à Stagyre en Macédoine, éloignée d’environ cinquante milles ; mais seul, sans projet et sans ressource, le malheureux Isaac ne put éviter son sort ; il fut arrêté, conduit à Constantinople, privé de la vue et jeté dans une tour solitaire où il fut réduit au pain et à l’eau pour toute subsistance. Au moment de la révolution, son fils Alexis, élevé dans l’espérance de l’empire, n’avait encore que douze ans. L’usurpateur épargna son enfance, et le destina, soit durant la paix, soit durant la guerre, à faire partie de la pompe de sa cour. L’armée étant campée sur les bords de la mer, un vaisseau italien favorisa la fuite du jeune prince ; sous l’habit d’un matelot, il échappa aux recherches de ses ennemis, passa l’Hellespont, et se trouva bientôt en Sicile à l’abri du danger. Après avoir salué la demeure des saints apôtres et imploré la protection du pape Innocent III, Alexis se rendit à l’invitation de sa sœur Irène, épouse de Philippe de Souabe, roi des Romains. Mais en traversant l’Italie, il apprit que la fleur des chevaliers d’Occident, assemblés à Venise, se préparait à passer dans la Terre-Sainte ; et il s’éleva dans son cœur un rayon d’espoir d’obtenir de leurs invincibles armes le rétablissement de son père.

Quatrième croisade. A. D. 1198.

Environ dix ou douze ans après la perte de Jérusalem, la noblesse de France fut appelée de nouveau au service de la guerre sainte par la voix d’un troisième prophète, moins extravagant peut-être que Pierre l’ermite, mais fort au-dessous de saint Ber-