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sacrifiées au zèle, à l’avarice ou au ressentiment du Vieux de la montagne, nom qu’on lui donnait par corruption. L’épée de Holagou brisa ses poignards, les seules armes dont il sût faire usage : il ne reste aujourd’hui d’autre vestige de ces ennemis de l’humanité que le mot d’assassin, que les langues de l’Europe ont adopté dans son sens le plus odieux. Le lecteur qui a suivi la grandeur et le déclin de la maison des Abbassides, ne verra point son extinction avec indifférence. Depuis la chute des descendans de l’usurpateur Seljouk, les califes avaient recouvré leurs états héréditaires de Bagdad et de l’Irac d’Arabie ; mais la ville était déchirée par des factions théologiques, et le commandeur des fidèles s’ensevelissait dans son harem, composé de sept cents concubines. À l’approche des Mongouls, il leur opposa de faibles armées et des ambassades hautaines. « C’est par l’ordre de Dieu, dit le calif Mostasem, que les fils d’Abbas commandent sur la terre. Il soutient leur trône, et leurs ennemis seront châtiés dans ce monde et dans l’autre. Qui est donc cet Holagou qui ose s’élever contre eux ? S’il veut la paix, qu’il se retire à l’instant de leur territoire sacré, et il obtiendra peut-être de notre clémence le pardon de sa faute. » Un visir perfide entretenait cette aveugle présomption, et assurait son maître que, les Barbares fussent-ils dans la ville, les femmes et les enfans suffiraient pour les écraser du haut de leurs terrasses. Mais à peine Holagou eut-il touché le fantôme, qu’il s’évanouit en fumée ; après deux mois de siége, Bag-