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ils étaient commandés par Doria et Pisani, dont les familles et les noms tiennent une place honorable dans les annales de leur patrie ; mais les talens et la réputation du premier éclipsaient le mérite personnel de son rival. Ils attaquèrent les ennemis dans un moment de tempête, et le combat tumultueux dura depuis l’aurore jusqu’à la fin du jour. Les ennemis des Génois font l’éloge de leur valeur, et la conduite des Vénitiens n’obtient pas même l’approbation de leurs amis ; mais les deux partis admirent unanimement l’adresse et la valeur des Catalans, qui, couverts de blessures, soutinrent tout l’effort du combat. Lorsque les deux flottes se séparèrent, la victoire pouvait paraître incertaine. Cependant si les Génois perdirent treize galères prises ou coulées bas, ils en détruisirent vingt-six, deux des Grecs, dix des Catalans, et quatorze des Vénitiens. Le chagrin des vainqueurs fit connaître qu’ils étaient accoutumés à compter sur des victoires plus décisives ; mais Pisani avoua sa défaite en se retirant dans un port fortifié, d’où ensuite, sous le prétexte d’exécuter les ordres du sénat, il fit voile avec les restes d’une flotte fugitive et en désordre pour l’île de Candie, laissant la mer libre à ses rivaux. Dans une lettre adressée publiquement au doge et au sénat, Pétrarque[1] em-

  1. L’abbé de Sade (Mémoires sur la vie de Pétrarque, t. III, p. 257-263) a traduit cette lettre qu’il avait copiée dans un manuscrit de la Bibliothéque du roi de France.