Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 12.djvu/264

Cette page a été validée par deux contributeurs.

deux nations étant maîtresses, l’une de la terre et l’autre de la mer, Constantinople et Péra éprouvaient également tous les inconvéniens d’un siége. Les marchands de la colonie, qui s’étaient flattés de voir terminer la querelle en peu de jours, commençaient à murmurer de leurs pertes ; la république de Gènes, déchirée par des factions, tardait à envoyer des secours ; et les plus prudens profitèrent de l’occasion d’un vaisseau de Rhodes pour éloigner leur fortune et leur famille du théâtre de la guerre. [Défaite de la flotte de Cantacuzène.]Au commencement du printemps, la flotte de Byzance, composée de sept galères et de quelques petits vaisseaux, sortit du port, cingla, rangée sur une seule ligne, vers le rivage de Péra, et présenta maladroitement le flanc à la proue de ses adversaires. Les équipages étaient composés de paysans ou d’ouvriers qui n’avaient point, pour compenser leur ignorance, le courage naturel des Barbares. Le vent était fort, la mer haute : à peine aperçurent-ils de loin l’escadre ennemie encore immobile, qu’ils se précipitèrent dans la mer, se livrant à un danger certain pour éviter un danger douteux. Les troupes qui marchaient à l’attaque des lignes de Péra, furent au même instant saisies de la même terreur panique, et les Génois furent étonnés, presque honteux du peu que leur avait coûté cette double victoire ; ayant couronné de fleurs leurs vaisseaux, ils amarinèrent les galères abandonnées, et les promenèrent plusieurs fois en triomphe devant les murs du palais. La seule vertu que pût en ce moment exercer l’empereur était la patience, et l’espoir de la vengeance