Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 12.djvu/244

Cette page a été validée par deux contributeurs.

de suivre sa fortune abattue. Un grand nombre l’abandonna bassement avec quelques protestations ; et sa troupe fidèle se trouva réduite d’abord à deux mille, et enfin à cinq cents hommes. Le cral ou despote des Serviens[1] le reçut avec humanité ; mais du rôle d’allié, il descendit successivement à celui de suppliant, d’otage et de captif, réduit à attendre à la porte d’un Barbare qui pouvait disposer à son gré de la vie et de la liberté d’un empereur romain. Les offres les plus séduisantes ne purent cependant déterminer le cral à violer les lois de l’hospitalité ; mais il se rangea bientôt du côté du plus fort, et renvoya, sans lui faire aucune insulte, son ami Cantacuzène s’exposer ailleurs à de nouvelles vicissitudes d’espérances et de dangers. Des succès variés alimentèrent durant près de six années les fureurs et les désordres de la guerre civile. [Guerre civile. A. D. 1341-1347.]Les factions des Cantacuzains et des Paléologues, des nobles et des plébéiens, remplissaient les villes de leurs dissensions, et invitaient mutuellement les Bulgares, les Serviens

  1. On nommait les princes de Servie (Ducange, Fam. dalmat., etc., c. 2, 3, 4-9) despotes en langue grecque, et cral dans leur idiome national (Ducange, Gloss. græc., p. 751). Ce titre, l’équivalent de roi, paraît tirer son origine de la Sclavonie, d’où il est passé chez les Hongrois, chez les Grecs et même chez les Turcs (Leunclavius, Pandect. turc, p. 422), qui réservent le nom de padishah pour l’empereur. Obtenir le premier au lieu du dernier, est l’ambition des Français à Constantinople (Avertissement à l’Histoire de Timur-Bec, p. 39).