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Inimitié des Grecs et des Latins. A. D. 1000-1200.

L’antipathie des Grecs et des Latins se nourrit et se manifesta dans les trois premières expéditions de la Palestine. Alexis Comnène employa tous ses artifices, au moins à éloigner ces redoutables pèlerins. Ses successeurs, Manuel et Isaac-Lange, conspirèrent avec les musulmans la ruine des plus illustres chefs des Francs, et leur politique insidieuse et perfide fut toujours secondée par l’obéissance volontaire de leurs sujets de toutes les classes. On peut sans doute attribuer en partie cette aversion à la différence du langage, de l’habillement et des manières qui divise et aliène les unes des autres presque toutes les nations du globe. L’orgueil et la prudence du souverain s’indignaient également de ces invasions d’armées étrangères qui réclamaient impérieusement le droit de traverser ses états et de passer sous les murs de sa capitale. Ses sujets étaient pillés et insultés par les grossiers habitans de l’Occident, et la haine de ces Grecs pusillanimes était envenimée par la secrète jalousie que leur inspiraient les pieuses et courageuses entreprises des Francs ; mais le zèle aveugle de la religion ajoutait encore aux motifs profanes de l’aversion nationale ; au lieu de se voir amicalement reçus par leurs frères, les chrétiens de l’Orient, les chrétiens d’Occident entendaient retentir autour d’eux les noms de schismatiques et d’hérétiques, plus offensans pour les oreilles orthodoxes.

    bien cependant la voix de l’histoire est calme et modérée en comparaison de celle des théologiens !