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ture de la force du corps et de celle de l’âme[1]. L’extrême froid a diminué la stature des Lapons et glacé, pour ainsi dire, les facultés de leur esprit ; et de tous les enfans des hommes, les tribus arctiques ignorent seules la guerre et n’ont jamais versé le sang humain : heureuse ignorance, si leur paisible vie était un effet de la raison et de la vertu[2] !

Tactique et mœurs des Hongrois et des Bulgares. A. D. 900, etc.

L’auteur de la Tactique[3], l’empereur Léon, observe que toutes les hordes de la Scythie se res-

  1. Ce tableau des Hongrois et des Bulgares est tiré principalement de la Tactique de Léon (p. 796-801) et des Annales latines que rapportent Baronius, Pagi et Muratori, A. D. 889, etc.
  2. Buffon, Hist. nat., t. V, p. 6, in-12. Gustave Adolphe entreprit sans succès de former un régiment de Lapons. Grotius dit de ces tribus arctiques, Arma, arcus et pharetra, sed adversus feras (Ann., l. IV, p. 236) ; et d’après l’exemple de Tacite, il essaie de couvrir d’un vernis philosophique leur brutale ignorance.
  3. Léon a observé que le gouvernement des Turcs était monarchique, et que leurs châtimens étaient rigoureux (Tactique, p. 896, αϖεινεις και βαρειας). Rhegino (in Chron., A. D. 889) met le vol au nombre des crimes capitaux, ce qui est confirmé par le code original de Saint-Étienne (A. D. 1016). Si un esclave commettait un délit, la première fois on lui coupait le nez ou on l’obligeait à payer cinq vaches ; la seconde fois on lui coupait les oreilles ou on exigeait de lui la même amende ; la troisième, il était puni de mort ; ce n’est qu’à la quatrième offense qu’on infligeait ce châtiment à l’homme libre, qui, pour un premier délit, perdait sa liberté (Katona, Hist. regum hungar., t. I, p. 231, 232).