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en y comprenant ces deux villes ; que le comte de Tripoli et le prince d’Antioche seraient compris dans la trêve ; et que durant trois ans et trois mois on cesserait, de part et d’autre, toute hostilité. Les principaux chefs des deux armées jurèrent d’observer la convention ; mais les deux monarques se contentèrent de donner leur parole et la main droite ; on dispensa la majesté royale d’un serment qui semble indiquer le soupçon de perfidie. Richard courut chercher en Europe une longue captivité et une mort prématurée ; et un petit nombre de mois termina la vie et la gloire de Saladin. [Mort de Saladin. 4 mars. A. D. 1195.]Les Orientaux célèbrent la manière édifiante dont il mourut à Damas ; mais ils semblent ignorer qu’il distribua également ses aumônes aux sectateurs des trois différentes religions[1] ou qu’il fit étendre un drap mortuaire au lieu d’étendard, pour avertir l’Orient de l’instabilité de la grandeur humaine. Sa mort détruisit l’unité de l’empire ; ses fils furent opprimés par le bras puissant de leur oncle Saphadin ; les dissensions des sultans d’Égypte, de Damas et d’Alep[2] se renouvelèrent, et les Francs ou Latins respirèrent en paix dans leurs forteresses sur les côtes de la Syrie, et purent encore se livrer à l’espoir.

  1. Vertot lui-même (t. I, p. 251) adopte ce conte ridicule de l’indifférence de Saladin, qui professa la religion de Mahomet jusqu’à son dernier soupir.
  2. Voyez la succession des Ayoubites dans Abulpharage (Dynast., p. 277, etc.), les Tables de M. de Guignes, l’Art de vérifier les dates, et la Bibl. orient.