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dignes de le contempler. Ayant appris, en arrivant à Acre, que le sultan avait surpris la ville de Jaffa, il embarqua quelques troupes sur des vaisseaux marchands qui se trouvaient dans le port, et sauta le premier sur le rivage. Sa présence releva le courage des défenseurs de la citadelle, et soixante mille Turcs ou Sarrasins prirent la fuite en apprenant son arrivée. Instruits de la faiblesse de son escorte, ils reparurent dans la matinée du lendemain, et le trouvèrent campé sans précautions devant les portes avec dix-sept chevaliers et trois cents archers. Il soutint l’attaque sans s’embarrasser du nombre ; et ses ennemis attestent que Richard, brandissant sa lance, galoppa le long des rangs des Sarrasins depuis la droite de leur armée jusqu’à la gauche, sans rencontrer un seul mahométan qui eût la hardiesse de l’arrêter[1]. Est-ce donc ici l’histoire de Roland ou d’Amadis ?

Son traité et son départ. A. D. 1192. Septembre.

Durant les hostilités, les Francs et les musulmans commencèrent, cessèrent et reprirent plusieurs fois de lentes et languissantes négociations[2]. Quel-

  1. Bohadin (p. 184-249) et Abulféda (p. 51, 62) racontent les expéditions de Jaffa et de Jérusalem. L’auteur de l’Itinéraire ou le moine de Saint-Albans ne peut rien ajouter au rapport que fait le cadi des prouesses de Richard (Vinisauf, l. VI, c. 14-24, p. 412-421 ; Hist. major., p. 137-143) ; dans toute cette guerre on trouve une unanimité singulière entre les chrétiens et les mahométans, qui louent mutuellement les vertus de leurs ennemis.
  2. Voyez la suite des négociations et des hostilités dans