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Les maladies ou les désertions détruisirent ou dispersèrent le reste des Allemands, et le fils de l’empereur périt au siége d’Acre avec la plus grande partie des Souabes ses vassaux. De tous les héros latins, Godefroi de Bouillon et Frédéric Barberousse furent les seuls qui parvinrent à traverser l’Asie Mineure. Cependant leur succès même servit d’avertissement ; et dans les siècles plus éclairés des croisades suivantes, toutes les nations préférèrent les hasards de la mer à cette route pénible et dangereuse[1].

Opiniâtreté de l’enthousiasme des croisades.

L’enthousiasme de la première croisade est un événement simple et naturel. L’espérance était encore alors dans toute sa fraîcheur, le danger inconnu, et l’entreprise conforme au génie du siècle ; mais dans l’opiniâtre persévérance de l’Europe, c’est avec autant de surprise que de compassion qu’on voit l’expérience des malheurs sans fruit pour l’instruction, les mêmes travers produisant toujours la même

    croire à plusieurs écrivains, ou du moins écrire, que Frédéric s’était noyé dans le Cydnus, où Alexandre se baigna si imprudemment (Q.-Curt., l. III, c. 4, 5). Mais la marche de l’empereur me ferait plutôt supposer que le Saleph est le même que le Calycadnus, rivière moins célèbre que le Cydnus, mais d’un plus long cours.

  1. Marin Sanut (A. D. 1321) pose pour principe, quod stolus Ecclesiæ per terram nullatenus est ducenda. Il écarte au moyen d’un secours divin, l’objection ou plutôt l’exception que présente la première croisade. (Secreta fidelium crucis, l. II, pars II, c. 11, p. 37.)