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même les princes de l’empire, étaient accoutumés à obéir. Dès qu’il eut perdu de vue Philadelphie et Laodicée, les dernières villes de l’Empire grec, Barberousse s’enfonça dans une terre déserte, stérile et imprégnée de sel ; pays, dit l’historien, d’horreur et de tribulation[1]. Durant vingt jours d’une marche pénible et accablante, il fut attaqué à chaque pas par des hordes innombrables de Turcomans[2], qui semblaient renaître sans cesse plus furieux de leurs défaites. L’empereur ne se rebuta point de souffrir et de combattre ; et tel était l’excès de sa détresse, lorsqu’il atteignit Iconium, qu’à peine mille de ses chevaliers avaient encore la force de se tenir sur leurs chevaux. Cependant, par une attaque violente et imprévue, il renversa les musulmans, prit la ville d’assaut, et força le sultan[3] d’implorer sa clémence et la paix. La route une fois ouverte, Frédéric avança victorieusement jusqu’en Cilicie, où il fut malheureusement englouti dans un torrent[4]

  1. Terram horroris et salsuginis, terram siccam, sterilem, inamænam (Anonym. Canis., p. 517). C’est le langage emphatique d’un homme souffrant.
  2. Gens innumera, sylvestris, indomita, prædones sine ductore. Le sultan de Cogni pouvait se réjouir sincèrement de leurs défaites (Anonym. Canis., p. 517, 518).
  3. Voyez dans l’écrivain anonyme de la collection de Canisius, dans Tagino et Bohadin (vit. Salad. p. 119 et 120), la conduite équivoque de Kilidge Arslan, sultan de Cogni, qui haïssait et redoutait également Saladin et Frédéric.
  4. Le désir de comparer deux grands hommes a fait