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susceptibles de preuves, il fallait produire des témoins du fait. Dans les causes civiles, on n’accordait pas le combat comme une preuve justificative des droits du demandeur ; il était obligé de produire des témoins qui eussent ou affirmassent avoir connaissance du fait. Le combat devenait alors le privilége du défendeur, parce qu’il accusait les témoins de parjure à son préjudice, et se trouvait par conséquent dans le même cas que le demandeur en matière criminelle ; le combat ne prouvait dans ces occasions ni pour l’affirmative, ni pour la négative, comme l’a supposé M. de Montesquieu[1]. Mais le droit d’offrir le combat était fondé sur celui d’obtenir par les armes le redressement d’une injure ; et le combat judiciaire avait lieu d’après les principes ou les motifs qui occasionnent aujourd’hui nos duels. On n’accordait un champion qu’aux femmes et aux hommes privés d’un membre ou au-dessus de l’âge de soixante ans. La défaite entraînait la mort de l’accusé ou de l’accusateur ou celle de son champion ou témoin ; mais dans les causes civiles, le demandeur était puni par l’infamie et par la perte de son procès, tandis que son champion ou son témoin subissait une mort ignominieuse. Dans beau-

  1. Voyez l’Esprit des Lois, l. XXVIII. Durant les quarante années qui suivirent sa publication, aucun ouvrage n’a été plus lu et plus critiqué ; et l’esprit de recherche qu’il a éveillé n’est pas une des moindres obligations que nous ayons à son auteur.