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mier éclat de l’acier, on le salua avec des élans de joie et de dévotion. La sainte lance, tirée du lieu où elle était cachée, fut enveloppée dans un voile de soie brodé en or, et exposée à la vénération des croisés ; leur inquiétude se convertit en cris de joie et d’espérance, et l’enthousiasme rendit aux troupes découragées leur ancienne valeur. Quelle qu’eût été dans cette affaire la conduite des chefs, et quels que fussent leurs sentimens, ils soutinrent cette heureuse révolution par tous les moyens que pouvaient leur fournir la discipline et la religion. On renvoya les soldats dans leurs quartiers, en leur recommandant de se fortifier le corps et l’âme pour le prochain combat ; de consumer sans ménagement les dernières provisions des hommes et des chevaux, et d’attendre au point du jour le signal de la victoire. Le jour de la fête de saint Pierre et de saint Paul, les portes d’Antioche s’ouvrirent, et une procession de moines et de prêtres sortit en chantant un psaume martial : « Que le Seigneur se lève et que ses ennemis soient dispersés ! » On composa l’ordre de bataille de douze divisions en l’honneur des douze apôtres ; et en l’absence de Raimond, son chapelain fut chargé de porter la sainte lance. L’influence de cette relique ou de ce trophée se fit vivement sentir aux serviteurs du Christ, et peut-être même à ses ennemis[1]. Un

  1. Le mahométan Aboulmahasen (apud de Guignes, t. IX, part. 2, p. 95) est plus correct dans ce qu’il rapporte de la sainte lance, que les chrétiens Anne Comnène et Abul-