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de la Germanie[1], était dans son origine simple et sans mélange d’idées religieuses. Après quelques épreuves d’usage, on chaussait au candidat les éperons, on lui ceignait l’épée, et on le frappait légèrement sur l’épaule ou sur la joue, comme pour l’avertir que cet affront était le dernier qu’il dût souffrir sans en tirer vengeance ; mais la superstition était venue se mêler à toutes les actions de la vie, soit publique, soit privée ; les guerres saintes sanctifièrent la profession des armes, et l’ordre de la chevalerie partagea les droits et les priviléges des ordres sacrés de la prêtrise. Le bain et la robe blanche du novice étaient une indécente imitation de la régénération du baptême. Les ministres de la religion bénissaient son épée qu’il déposait sur l’autel ; des prières et des jeûnes précédaient sa réception, et on l’armait chevalier au nom de Dieu, de saint George et de l’archange saint Michel. Il faisait le vœu de remplir les devoirs de sa profession, et l’éducation, l’exemple et l’opinion publique, garantissaient l’exécution de sa promesse. Comme champion de Dieu et des dames (j’ai honte de réunir deux idées si discordantes), il s’engageait à ne jamais trahir la vérité, à maintenir la justice, à protéger les malheureux, à pratiquer la courtoisie, vertu moins familière aux anciens ; à combattre les infidèles, à mépriser les attraits d’une vie douce et paisible, et à soutenir

  1. Framea scutoque juvenem ornant. Tacite, Germania, c. 13.