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la Macédoine et l’Épire, et attirèrent dans leur communion et sous leurs drapeaux un assez grand nombre de Bulgares. Aussi long-temps qu’ils furent tenus en respect par la force et traités avec modération, leurs troupes se distinguèrent dans les armées de l’empire, et les pusillanimes Grecs remarquent avec étonnement, et presque d’un ton de reproche, le courage de ces chiens toujours passionnés pour la guerre, et avides de sang humain. Ce même courage les rendait arrogans et opiniâtres ; ils se laissaient facilement entraîner au caprice ou au ressentiment, et leurs priviléges étaient souvent violés par les dévotes infidélités du clergé et du gouvernement. Au milieu de la guerre des Normands, deux mille cinq cents manichéens abandonnèrent les drapeaux d’Alexis Comnène[1], et retournèrent dans leur pays. L’empereur indigné dissimula jusqu’à ce qu’il eût trouvé le moment de la vengeance ; ayant appelé les chefs à une conférence amicale, et sans distinguer les innocens des coupables, il les punit tous par la prison, la confiscation de leurs biens et le baptême. Dans un intervalle de paix, il forma le pieux dessein de les réconcilier avec l’Église et avec l’état ; ce prince, surnommé par sa dévote fille le

  1. Anne Comnène raconte dans l’Alex. (l. V, p. 31 ; l. VI, p. 154-155 ; l. XIV, p. 450-457, avec les Rem. de Ducange) la conduite apostolique de son père envers les manichéens : elle les traitait d’abominables hérétiques, et elle avait le projet de les réfuter.