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à repousser les Barbares sur les confins de l’Asie avant qu’ils s’avançassent dans le cœur de l’Europe. Au récit de la triste et périlleuse situation des chrétiens de l’Orient, toute l’assemblée fondit en larmes ; les plus ardens déclarèrent qu’ils étaient prêts à marcher, et les envoyés d’Alexis emportèrent en partant l’assurance d’un secours prompt et puissant. Le projet de délivrer Constantinople n’était qu’une partie du projet plus vaste formé pour la délivrance de Jérusalem ; mais le prudent Urbain en remit la décision finale à un second synode qu’il proposa d’assembler dans une ville de France durant l’automne de la même année. Ce court délai tendait à augmenter l’enthousiasme ; et d’ailleurs le pontife fondait son plus ferme espoir sur une nation de soldats[1], fière de la supériorité de son nom et ambitieuse d’imiter son héros Charlemagne[2], à qui le roman populaire de Turpin[3]

  1. Guibert, né en France, fait lui-même l’éloge de la valeur et de la piété de sa nation, qui prêcha la croisade et en donna l’exemple : Gens nobilis, prudens, bellicosa, dapsilis et nitida… Quos enim Britones, Anglos, Ligures, si bonis eos moribus videamus, non illico Francos homines appellemus ? (p. 478). Il assure cependant que la vivacité des Français dégénère en pétulance avec les étrangers (p. 483), et en vaines rodomontades (p. 502.).
  2. Per viam quam jamdudum Carolus magnus mirificus rex Francorum aptari fecit usque C. P. (Gesta Franc., p. 1 ; Robert Monach., Hist. Hieros., l. I, p. 33, etc.)
  3. Jean Tilpin ou Turpin fut archevêque de Reims, A. D. 773. Postérieurement à l’année 1000, un moine des