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romain ; mais le fait est douteux ; et si, dans l’insolence de la victoire, le sultan se conforma à un usage de la nation des Turcs, la conduite d’Alp-Arslan a d’ailleurs arraché les éloges des fanatiques grecs, et peut servir de modèle aux siècles les plus civilisés. Il releva sur-le-champ le prince captif, et, lui serrant par trois fois la main avec tendresse, il l’assura qu’on n’attenterait ni à ses jours ni à sa dignité, et qu’Arslan avait appris à respecter la majesté de ses égaux et les vicissitudes de la fortune. On mena ensuite Romanus dans une tente voisine, où il fut servi avec appareil et avec respect par les officiers du sultan, qui, le matin et le soir, lui donnait la place d’honneur à sa table. Durant une conversation familière de huit jours, le vainqueur ne se permit pas une parole, pas un coup d’œil d’insulte ; mais il censura vivement les indignes sujets qui avaient abandonné leur brave prince au moment du danger, et il avertit doucement son antagoniste de quelques erreurs qu’il avait commises dans la conduite de la guerre. En discutant les préliminaires de la négociation, il demanda à l’empereur quel traitement il s’attendait à recevoir ; et la tranquille indifférence de celui-ci donna une preuve de la liberté d’esprit qu’il conservait. « Si vous êtes cruel, lui dit-il, vous m’ôterez la vie ; si vous écoutez l’orgueil, vous me traînerez derrière votre char ; et si vous consultez vos intérêts, vous

    est rapporté par Scylitzes et Manassès, mais qui paraît difficile à croire.