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contre les plus sages avis, il se hâta de livrer une bataille décisive. S’il eût prêté l’oreille aux propositions raisonnables qui lui furent faites de la part du sultan, il pouvait encore s’assurer une retraite et peut-être la paix ; mais Romanus ne vit dans ces ouvertures que la crainte ou la faiblesse de l’ennemi ; et il répondit du ton de l’insulte et du défi : « Si le Barbare désire la paix, il doit abandonner aux Romains le terrain qu’il occupe, et livrer la ville et le palais de Rey pour gage de sa bonne foi. » Arslan sourit de cet excès de vanité, mais il déplora la mort d’un si grand nombre de fidèles musulmans, et, après une prière fervente, il déclara à ses soldats que ceux qui voulaient se retirer en avaient la permission. Il releva lui-même les crins de la queue de son cheval ; il échangea son arc et ses traits contre une massue et un cimeterre, se revêtit d’un habit blanc, se parfuma de musc, et déclara que s’il était vaincu, le lieu où il se trouvait serait celui de sa sépulture[1]. Il avait affecté de rejeter ses armes de trait, mais il attendait la victoire des flèches de la cavalerie turque, dont les escadrons étaient épars en forme de croissant. Romanus, au lieu de distribuer son armée en lignes successives et en corps de réserve, selon la tactique

  1. Les auteurs Grecs ne disent pas d’une manière si claire que le sultan se soit trouvé à la bataille : ils assurent que Arslan donna le commandement de ses troupes à un eunuque, et qu’il se retira au loin, etc. Est-ce par ignorance ou par jalousie, ou bien le fait est-il véritable ?