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rêt cet édifiant récit, et le calife honora Mahmoud du titre de gardien de la fortune et de la foi de Mahomet.

Son caractère.

Engagé dans ces sentiers sanglans dont se compose l’histoire des nations, je ne puis cependant me refuser à m’en détourner pour recueillir quelques-unes des fleurs de la science et de la vertu. Le nom de Mahmoud le Gaznevide est encore respecté en Orient ; ses sujets jouirent de la prospérité et de la paix ; ses vices se cachèrent sous le voile de la religion, et deux exemples prouveront sa justice et sa magnanimité, 1o. Un jour qu’il siégeait au divan, un malheureux vint se prosterner au pied du trône pour faire entendre des plaintes contre l’insolence d’un soldat turc, qui l’avait chassé de sa maison et de son lit. « Suspendez vos cris, lui dit Mahmoud ; ayez soin de m’avertir lorsque le coupable retournera chez vous, et j’irai moi-même le juger et le punir. » Le sultan, averti bientôt après, suivit son guide, rangea ses gardes autour de la maison, et faisant éteindre les flambeaux, il prononça la mort de celui qu’on venait de surprendre dans un crime de vol et d’adultère. L’arrêt exécuté, on ralluma les flambeaux ; Mahmoud se mit à genoux, et lorsque sa prière fut achevée, il demanda quelques alimens grossiers qu’il mangea avec la voracité de la faim. Le pauvre homme auquel il venait de rendre justice ne put contenir l’expression de son étonnement et de sa curiosité, et l’affable sultan daigna expliquer les motifs d’une conduite si singulière. « J’avais