Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 11.djvu/17

Cette page a été validée par deux contributeurs.

ne convenait pas à l’esprit du temps[1], et ceux des chrétiens raisonnables qui auraient pu être bien aises qu’on réduisît la religion au joug léger impose par Jésus-Christ et les apôtres, s’offensèrent avec justice de ce que les pauliciens osaient violer l’unité de Dieu, premier article de la religion naturelle et de la religion révélée. Quoique les pauliciens crussent et espérassent dans le Père, le Christ, l’âme humaine et le monde invisible, ils adoptaient l’éternité de la matière, substance opiniâtre et rebelle, origine d’un second principe, d’un être actif qui a créé le monde visible, et exercera son pouvoir temporel jusqu’à la consommation définitive de la mort et du péché[2]. L’existence du mal moral et du mal physique avait établi ces deux principes dans l’ancienne philosophie et l’ancienne religion de l’Orient, d’où cette doctrine s’était répandue parmi les différentes sectes des gnostiques. On peut découvrir sur Ahriman autant d’opinions diverses qu’il se trouve de nuances entre la nature d’un Dieu rival d’un autre, et celui d’un démon subordonné ; entre le caractère d’un être emporté par la passion et la fragilité, ou celui d’un être malveillant par son essence ; mais

  1. Pierre le Sicilien (p. 756) a indiqué avec beaucoup de prévention et de passion les six erreurs capitales des pauliciens.
  2. Primum illorum axioma est, duo rerum esse principia ; Deum malum et Deum bonum aliumque hujus mundi conditorem et principem, et alium futuri ævi. (Pierre le Sicilien, p. 756.)