Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 11.djvu/166

Cette page a été validée par deux contributeurs.

que la déesse des Athéniens[1]. Quoique blessée d’un trait, elle demeura sur le champ de bataille, et par ses exhortations et son exemple, rallia les troupes dispersées[2]. Sa faible voix était secondée par la voix plus forte et le bras plus vigoureux de Guiscard : aussi calme au milieu de l’action que magnanime dans les conseils : « Où fuyez-vous ? s’écriait-il ; votre ennemi est implacable, et la mort est moins fâcheuse que la servitude. » Le moment était décisif ; les Varangiens en se portant au-devant de la ligne, laissèrent leurs flancs à découvert ; les huit cents chevaliers qui formaient le corps de bataille du duc n’avaient point été entamés (ils se précipitèrent la lance

  1. Παλλας αλλη και μη Αθηνη. Le président Cousin (Hist. de Constantinople, l. IV, p. 131, in-12.) a fort bien traduit : « Qui combattait comme une Pallas, quoiqu’elle ne fût pas aussi savante que celle de la Grèce. » Les Grecs avaient composé les attributs de leur déesse de deux caractères très-peu faits pour s’accorder, celui de Neith, l’ouvrière de Saïs en Égypte, et celui d’une vierge amazone du lac Tritonien dans la Libye (Banier, Mythologie, t. IV, p. 1-31, in-12).
  2. Anne Comnène (l. IV, p. 116) admire avec une sorte d’effroi ses mâles vertus. Elles étaient plus familières aux Latins ; et quoique l’Apulien (l. IV, p. 273) fasse mention de sa présence et de sa blessure, il lui donne beaucoup moins d’intrépidité :

    Uxor in hoc bello Roberti forte sagittâ
    Quâdam læsa fuit : quo vulnere territa nullam
    Dum sperabat opem, se pœne suregerat hosti.


    Le mot de subegerat n’est pas heureux lorsqu’il s’agit d’une femme prisonnière.