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Humphroy, troisième comte de la Pouille, hérita de son courage. Les assassins furent punis ; Argyre, renversé et blessé, courut, loin du champ de bataille, cacher sa honte derrière les murs de Bari, en attendant les tardifs secours de ses alliés.

Expédition du pape Léon IX contre les Normands. A. D. 1053.

Mais l’empire de Constantin était troublé par la guerre contre les Turcs : Henri était faible et irrésolu ; et le pape, au lieu de repasser les Alpes avec une armée d’Allemands, ne ramena que sept cents soldats de la Souabe et quelques volontaires de la Lorraine. Dans sa marche lente de Mantoue à Bénévent, il reçut sous la sainte bannière un vil mélange d’Italiens de toutes les classes[1]. Le prêtre et le voleur couchaient dans la même tente : on voyait dans les premiers rangs les piques se mêler avec les croix, et le saint guerrier qui les conduisait répétait dans l’ordre des marches, des campemens et des combats, les leçons militaires qu’il avait reçues dans sa jeunesse. Les Normands de la Pouille ne purent mettre en campagne que trois mille cavaliers et un petit nombre de fantassins. La défection des naturels du pays les priva de vivres et coupa leur retraite, et un respect superstitieux glaça pour un moment leur bravoure incapable de crainte. En voyant Léon

  1. Voyez, sur l’expédition de Léon IX contre les Normands, Guillaume l’Apulien (l. II, p. 259-261) et Geoffroy Malaterra (l. I, c. 13, 14, 15, p. 253). Ces deux auteurs ont de l’impartialité ; leur prévention naturelle se trouve contrebalancée par leur prévention de prêtres.