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peut se former une idée des richesses littéraires du douzième siècle. Constantinople était encore éclairée par le génie d’Homère et de Démosthène, d’Aristote et de Platon ; et au milieu des richesses dont nous jouissons ou que nous négligeons, nous devons porter envie à la génération qui pouvait lire l’histoire de Théopompe, les oraisons d’Hypérides, les comédies de Ménandre[1] et les odes d’Alcée et de Sapho. Le grand nombre des commentaires publiés à cette époque sur les classiques grecs prouve que non-seulement ils existaient alors, mais qu’ils étaient même entre les mains de tout le monde ; et deux femmes, l’impératrice Eudoxie et la princesse Anne Comnène, qui cultivèrent sous la pourpre la rhétorique et la philosophie[2], sont un exemple assez

  1. Gérard Vossius (De pœtis græcis, c. 6) et Le Clerc (Bibliothéque choisie, t. XIX, p. 285) indiquent, d’après des témoignages obscurs ou d’après des ouï-dire, un Commentaire de Michel Psellus, sur les vingt-quatre comédies de Ménandre, alors existant en manuscrit à Constantinople. Ces travaux classiques paraissent incompatibles avec la gravité et la pesanteur d’un lourd savant qui pâlissait sur les catégories (de Psellis, p. 42), et il est vraisemblable qu’on a confondu Michel Psellus avec Homère Sellius, qui avait écrit les argumens des comédies de Ménandre. Suidas comptait au douzième siècle cinquante comédies de cet auteur ; mais il transcrit souvent l’ancien Scholiaste d’Aristophane.
  2. Anne Comnène a pu s’enorgueillir de la pureté de sa diction grecque (το Ελληνιζειν ες ακρον εσπο‌υδακυια), et Zonare, son contemporain, mais non son adulateur, a pu