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ter de la victoire, ou de couvrir la retraite. La régularité des camps et des marches, des exercices et des évolutions, les édits et les livres du monarque de Byzance faisaient, du moins en théorie, tout ce que peut faire l’autorité[1]. Telle était la richesse du prince et l’habileté de ses nombreux ouvriers, que les armées avaient en abondance tout ce qu’elles pouvaient désirer en ustensiles et en munitions. Mais l’autorité du prince et l’adresse de ses ouvriers ne pouvaient former la machine la plus importante, c’est-à-dire le soldat ; et si le cérémonial de Constantin suppose toujours que l’empereur reviendra triomphant[2], sa tactique ne s’élève guère au-dessus des moyens d’échapper à une défaite et de prolonger une guerre[3].

  1. Léon, dans la préface de sa Tactique, déplore sans déguisement la perte de la discipline et les malheurs du temps ; il répète sans scrupule (Proëm., p. 587) les reproches de αμελεια, αταξια, αγυμνασια, δειλια, etc. ; et il paraît que sous la génération suivante les élèves de Constantin méritaient la même censure.
  2. Voy. dans le Cérémonial, l. II, c. 19, p. 353) l’étiquette observée lorsque l’empereur foulait à ses pieds les Sarrasins captifs, tandis qu’on chantait : « Tu as fait de mes ennemis un marche-pied », et le peuple répétait le Kyrie eleison quarante fois de suite.
  3. Léon observe (Tactique, p. 668) qu’une bataille rangée contre une nation quelconque, est επισφαλες et επικινδυνον, Les mots sont énergiques et la remarque est juste : cependant si les premiers Romains avaient eu la même opinion, Léon n’aurait jamais donné de lois aux rivages du Bosphore de Thrace.