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la réputation et la piété d’un héros qui avait rétabli l’empire d’Occident, firent taire tous les scrupules. Théophane, après la mort de son beau-père et de son mari, gouverna Rome, l’Italie et l’Allemagne durant la minorité de son fils Othon III, et les Latins ont loué les vertus d’une impératrice qui sacrifia le souvenir de son pays à des devoirs d’un ordre supérieur[1]. Lors du mariage de sa sœur Anne, la voix impérieuse de la nécessité ou de la crainte imposa silence à tous les préjugés, écarta toutes les considérations relatives à la dignité impériale. [Wolodimir, prince de Russie. A. D. 988.]Un idolâtre des contrées du Nord, Wolodimir, duc de Russie, aspira à la main de la fille des empereurs ; il soutint sa demande d’une menace de guerre, de la promesse de se convertir et d’une offre de secours contre un rebelle qui troublait l’empire. La princesse grecque, victime de sa religion et de son pays, fut arrachée du palais de ses aïeux et condamnée à aller chercher une couronne sauvage et un exil sans espoir sur les rives du Borysthène ou dans le voisinage du cercle polaire[2]. Au reste, ce mariage fut heureux et fé-

  1. Licet illa imperatrix græca sibi et aliis fuisset satis utilis et optima, etc. Tel est le préambule d’un auteur ennemi (apud Pagi, t. IV, A. D. 989, no 3). Muratori, Pagi et Saint-Marc parlent de son mariage et des principales actions de sa vie, à la date de chacun de ces événemens.
  2. Cedrenus (t. II, p. 699), Zonare (t. II, p. 221), Elmacin (Hist. Saracen., l. III, c. 6), Nestor (apud Lévesque, t. II, p. 112), Pagi (Critica, A. D. 987, no 6) ; singulier concours ! Wolodimir et Anne sont au nombre des saints