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des chevaux et des mules, et on les condamna à monter des ânes dans l’attitude des femmes. On borna l’étendue de leurs édifices publics et particuliers ; dans les rues ou dans les bains, ils doivent se retirer ou s’incliner devant le dernier homme du peuple, et on rejette leur témoignage s’il peut être préjudiciable à un vrai fidèle. On leur a défendu la pompe des processions, le son des cloches et la psalmodie ; leurs sermons et leurs entretiens doivent respecter la foi nationale, et le sacrilége qui veut entrer dans une mosquée ou séduire un musulman ne saurait échapper à la punition. Or, excepté dans les temps de trouble et d’injustice, on n’a jamais forcé les chrétiens à renoncer à l’Évangile ou à embrasser le Koran ; mais on a infligé la peine de mort aux apostats qui ont professé et abandonné la loi de Mahomet : ce fut en déclarant publiquement leur apostasie, et en se permettant de violentes invectives contre la personne et la religion du prophète, que les martyrs de la ville de Cordoue provoquèrent l’arrêt du cadi[1].

  1. Saint Euloge, qui lui-même fut immolé à son tour, célèbre et justifie les martyrs de Cordoue (A. D. 850, etc.). Un synode assemblé par le calife, censura leur témérité d’une manière équivoque. Le sage Fleury, qui montre ici sa modération ordinaire, ne peut accorder leur conduite avec la discipline de l’antiquité : « Toutefois l’autorité de l’Église, etc. » (Fleury, Hist. ecclés., t. X, p. 415-522, et surtout p. 451-508, 509). Les actes authentiques de ce synode jettent une lumière vive, bien que passagère, sur l’état de l’Église d’Espagne au neuvième siècle.